Lors du débat sur la mission Culture organisé par la commission des finances du Sénat dans le cadre du projet de loi de règlement du budget de l’année 2006, j’ai interrogé la nouvelle ministre de la culture sur deux sujets : la politique de soutien à l’emploi culturel dans le spectacle vivant et les actions de soutien aux industries culturelles. Vous trouverez ci-dessous les deux questions que j’ai posées hier soir en séance.
Question 1 : Soutien à l’emploi culturel
Puisque le présent projet de loi de règlement est le premier accompagné des rapports annuels de performances qui doivent, dans l’esprit de la LOLF, être l’outil privilégié du contrôle de l’efficacité des politiques publiques, je souhaite interroger madame la ministre sur la politique de soutien à l’emploi culturel.
Un des objectifs pour 2006 du programme Création de la mission Culture était le soutien à l’emploi culturel. Au-delà du fonds permanent de professionnalisation et de solidarité mis en place par l’Etat en complément du protocole d’accord du 18 avril 2006, votre prédécesseur a pris des engagements et a initié une politique pour répondre à la crise de l’intermittence par des mesures de structuration et de soutien à l’emploi dans le spectacle vivant.
J’aimerais vous interroger sur les réalisations effectives visant à favoriser cette politique. Je rappellerai les principales mesures mises en œuvre et les interrogations qu’elles suscitent.
Il s’agissait, en premier lieu, d’organiser et structurer le secteur du spectacle vivant, notamment par la conclusion de conventions collectives. La lecture du rapport annuel de performance nous apprend que quatre conventions collectives ont été conclues. Répondent-elles aux objectifs qui avaient été fixés ? Qu’apportent-elles à l’organisation et à la régulation de ce secteur ? Si cette politique nous paraît nécessaire, elle ne doit pas nous interdire de reparler de la redéfinition des annexes 8 et 10, comme le recommandait le rapport Charpillon, et qui est au cœur de la crise de l’intermittence. Nous avons, à mon avis, manqué l’occasion qui nous était donnée, lors de la renégociation de la convention Unedic, de réformer dans sa globalité le régime d’assurance chômage des intermittents. C’était le moment où, tout en garantissant le maintien du régime spécifique des intermittents dans le cadre général de la solidarité interprofessionnelle, nous aurions pu le réformer en profondeur, en redéfinissant notamment son périmètre afin de bâtir un système opérationnel, vertueux et équitable, comme tout le monde s’y était engagé.
Dans cette logique, le ministère a également souhaité renforcer l’efficacité des contrôles, notamment en lançant un plan de lutte contre le travail illégal. Cela afin que les employeurs n’abusent pas de l’intermittence, là où son recours est injustifié comme c’est le cas notamment dans certaines entreprises de l’audiovisuel public. Votre administration réfléchit-elle à un indicateur de performance plus pertinent pour rendre compte des efforts faits dans ce domaine ? Pouvez-vous nous dire, madame la ministre, où nous en sommes de cette politique ?
Il s’agissait ensuite d’orienter les financements publics vers l’emploi, selon les préconisations des rapports Guillot et Auclaire. Lors du débat sur le spectacle vivant, nous avions demandé à ce que les structures et les établissements qui ont recours à des emplois permanents soient favorisées, notamment en conditionnant les subventions publiques à ces efforts. Où en est cette politique ? A-t-elle donnée les résultats escomptés ? Nous savons tous qu’il faut repenser nos critères d’attribution des subventions en ayant comme objectif la pérennisation des structures et des compagnies, dont on connaît la fragilité. Nombre d’entre elles ont disparues ou sont fragilisées par la crise de l’intermittence.
Je note, à ce propos, que l’objectif « soutien à l’emploi culturel et à la professionnalisation des secteurs » fait l’objet d’un seul indicateur de performance : la place de la rémunération des artistes dans les structures subventionnées. Il n’est peut être pas totalement pertinent : certes, il enregistre la part de la masse salariale des structures consacrée aux rémunérations versées directement à des artistes. Mais il faudrait le compléter et l’enrichir par un autre indicateur afin de tenir compte du pourcentage des emplois permanents créés dans ces structures, notamment pour ce qui concerne les emplois administratifs. Madame la ministre, comptez vous poursuivre dans cette logique ?
Question 2 : Soutien aux industries culturelles
Dans le programme Création de la mission Culture une action du ministère vise à soutenir les industries culturelles avec l’objectif de favoriser la diversité des offres. L’année 2006 a également vu l’adoption de la loi sur les droits d’auteurs et des droits voisins dans la société de l’information.
Le vote de cette loi, dans un climat passionné, sur les droits d’auteur et la rémunération des auteurs et des artistes-interprètes à l’ère numérique a été au cœur d’un débat plus large sur les nouveaux modes de consommation culturelle, la concentration des industries culturelles et la rémunération des créateurs.
Elle a également posé la question de la préservation de la diversité en matière d’offre culturelle dans le domaine du disque et du livre principalement.
Je rappellerai la crise que vit l’industrie du disque depuis plusieurs années maintenant. Ainsi entre 2002 et 2006 le marché de la musique a perdu près de 36% en valeur et 14,5% pour la seule année 2006, entraînant la suppression de milliers d’emplois. Nous savons que les ventes légales en ligne ne compensent pas les baisses de vente de CD matérialisés. Du fait d’une absence d’anticipation des majors à ce nouveau modèle de consommation de la musique, les plateformes légales, malgré leur améliorations, sont encore insuffisamment attrayantes, à la fois en termes d’offres et de prix. Dans le rapport annuel de performances, il est indiqué que le ministère œuvre pour le développement des offres légales de distribution dématérialisée de la musique grâce à un programme spécifique du Fonds pour la création musicale. Pouvez-vous nous en dire plus sur ce dispositif Madame la ministre ? Les professionnels du secteur ont avancé plusieurs mesures pour soutenir la filière musicale : extension du crédit d’impôt voté en 2006, adaptation du mécanisme des SOFICA à l’industrie phonographique, moratoire pour l’application de la TVA à 19,6% sur la musique dématérialisée… pour ne citer que les principales. Etes-vous favorable à ce type de mesures ?
Plus globalement, quel bilan tirez vous de la loi DADVSI après un an d’application ? Pensez-vous que cette loi qui n’empêche pas le téléchargement illégal doit être revue et corrigée ? Quelles mesures envisagez-vous pour maintenir la diversité musicale au-delà des dispositifs d’aide aux nouveaux talents qui existent déjà ?
Le ministère développe également plusieurs actions pour soutenir les commerces culturels de proximité que ce soit les disquaires ou les librairies indépendantes, notamment par la reconduction en 2006 du FISAC pour trois ans. Nous connaissons tous comme élus locaux le rôle essentiel que jouent ces canaux de distribution indépendants en matière de soutien et de diffusion de la diversité culturelle.
S’agissant du secteur du livre, un certain nombre d’aides, notamment du Centre national du livre, existent déjà pour aider les librairies indépendantes. Début 2007, le gouvernement a mis à l’étude la création de mesures juridiques et fiscales pour faire face aux difficultés grandissantes que connaissent ces commerces culturels de proximité, confrontés à la concentration du marché et aux bouleversements liés au numérique. L’idée d’un label spécifique pour les librairies indépendantes a été avancée. Il donnerait droit à des avantages, essentiellement des conditions fiscales incitatives, comme la possibilité d’être aidées par les collectivités locales à l’image des cinémas « Art et essai ». Pouvez-vous nous dire où en est cette réflexion et si nous verrons ce mesures se concrétiser dans le budget de la mission culture pour 2008 ?
en séance.