-Réforme du Collège: des questions sans réponse inquiétantes pour l’avenir de nos enfants-
« Mieux apprendre pour mieux réussir. » Alors que le lent déclin de notre collège se constate au quotidien dans toutes les évaluations internationales, les intentions du gouvernement étaient plus que louables. Comment ne pas adhérer à cette formule ?
Mais c’est bien là le problème: la maxime est jolie, le retour à la réalité est cinglant. Car en y regardant de plus près, la réforme des collèges voulue par la ministre de l’Education nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche déçoit. Pis! Elle inquiète.
Bien évidemment, la maîtrise des savoirs fondamentaux, lire, écrire, compter, est une priorité absolue que je défends personnellement réforme après réforme, année après année.
Mais la promesse d’une égalité parfaite à l’école de la République, avancée dans le préambule de ladite réforme, est trahie par la forme même de ce texte, manifestement réservé à une élite de pédagogues seuls capables de comprendre le langage qui y est employé. Un texte à la fois « techno » et verbeux, qui n’est pas sans rappeler celui dit de « Refondation de l’Ecole de la République », examiné en 2013 par le législateur à l’initiative du prédécesseur de Mme Vallaud-Belkacem, Vincent Peillon.
Et quand on parvient à décortiquer le fond, les questions sans réponse pointent peu à peu. « Quand c’est flou, c’est qu’il y a un loup »…
Citons ainsi les «Enseignements Pratiques Interdisciplinaires» (EPI) qui occuperaient 20% du temps à partir de la classe de 5ème, un enseignement « intégré » à l’horaire et aux programmes disciplinaires. Or, les exemples fournis par le gouvernement présentent des projets qui ne sont manifestement pas annuels tel que réaliser un journal sur tel thème, découvrir un métier ou encore organiser un débat. De plus, on ne sait pour l’instant pas qui va devoir assurer quoi, avec quelles contraintes, à quel moment de l’année et avec quelles autres disciplines…
Par ailleurs, il est à déplorer que les victimes collatérales de ces EPI soient le latin et le grec, outils essentiels tant pour la compréhension par les élèves de nos racines linguistiques et culturelles que d’une ouverture à des courants de pensée fondateurs de ce qui fait aujourd’hui la conception française et européenne de l’Homme.
Dans la même lignée, je m’interroge sur la mise en place de programmes d’histoire-géographie sans chronologie ou encore de l’enseignement de l’histoire de l’islam rendue obligatoire quand les Lumières deviennent optionnelles. Faut-il rappeler que cette période est au fondement même de notre culture laïque contemporaine?! Faire l’impasse sur cette naissance de la pensée moderne est très inquiétant.
Le devoir de l’Ecole et du collège est aussi, et surtout, de donner à nos enfants les moyens de saisir ce qui a fait, ce qui a patiemment construit la société dans laquelle ils vivent désormais. Des outils permettant de « savoir-être » dans un système de valeurs et de principes, d’être un citoyen éclairé et donc engagé.
Enfin, l’annonce d’un enseignement de Langue Vivante 2 dès la classe de cinquième pose question. Non pas en elle-même, mais parce qu’elle signerait la fin des dispositifs bilangues et des « classes européennes », aux bénéfices pourtant loués par les élèves et leurs parents. Quel autre effet aura cette mesure si ce n’est renforcer la fuite vers l’enseignement privé hors contrat?! Un collège à deux vitesses se dessine déjà. Est-ce cela le renforcement de l’égalité entre les élèves ?!
Ce texte devra être largement revu par les parlementaires, afin que soit défendu un enseignement disciplinaire structuré et progressif, offrant des parcours variés en fonction des capacités des élèves et permettant de dégager des plages consacrées aux élèves les plus en difficulté.
L’avenir de nos élèves en dépend.