A propos de la suppression de la publicité sur les chaînes publiques

Ftv

Lors de ses vœux à la presse, le président de la République a ouvert, à la surprise générale, le chantier de la suppression de la publicité sur la télévision publique. Si une réflexion sur le financement de France Télévisions me semble nécessaire, elle doit se faire en concertation avec l’ensemble des professionnels concernés. Chaque année lors de l’examen du budget médias, je réclame cette réflexion approfondie sur le financement du service public de l’audiovisuel constatant son sous financement chronique. Cette année encore, j’ai défendu l’idée d’une augmentation des ressources du groupe public pour lui permettre de relever les défis technologiques auxquels il doit faire face et pour lui permettre d’offrir aux téléspectateurs des programmes de qualité.

Pour que les chaînes publiques offrent au plus grand nombre un accès à la culture, à des  programmes de qualité et favorise les œuvres originales de création française, leur système de financement doit être revu en réduisant la part des ressources publicitaires et en reposant la question de la pérennité de la redevance audiovisuelle : souhaite-t-on augmenter la part de la redevance dans le financement de l’audiovisuel comme chez nos voisins allemand et britannique, sachant que la redevance en France est nettement inférieure que dans les autres pays européens ? Si telle est la voie choisie, cette augmentation devra tenir compte des revenus de chaque foyer afin de ne pas pénaliser les plus modestes. En tout cas, je suis hostile à une augmentation générale applicable à tous.

L’annonce présidentielle inquiète à juste titre les professionnels de l’audiovisuel car les modalités de la réforme ne sont  pas, pour le moment, connues. De surcroît les pistes envisagées pour mener à bien cette réforme ne sont pas rassurantes. Tout d’abord, la compensation de la perte de recettes publicitaires qui s’élèvent à environ 800 millions d’euros, soit 30% des ressources de France Télévisions : le président de la République a évoqué une taxe sur l’accès à Internet et la téléphonie mobile et une contribution sur les recettes publicitaires supplémentaires des chaînes privées. Or le produit de ces deux taxes rapporterait au mieux aux alentours de 300 à 400 millions d’euros, loin des 800 millions actuels. Qui financera le manque à gagner ? Il est indispensable que le gouvernement s’engage à le compenser intégralement. A défaut, les chaînes publiques n’auraient plus les moyens de faire face à leurs obligations légales et ne pourraient plus produire des programmes de qualité qui coûtent plus chers.

Au-delà de la compensation, c’est la question du périmètre du groupe France Télévisions qui est posée. La privatisation de France 2 ou le désengagement de France 3 des régions ont été évoqués à plusieurs reprises. Quelles sont les intentions du gouvernement dans ce domaine ? Nous n’en savons rien pour l’instant, mais serait-il acceptable de sacrifier une chaîne publique pour des raisons purement comptables ?  Je ne le pense pas.

Enfin, dernière interrogation sur cette réforme, l’équilibre du marché de la publicité télé. Les annonceurs et les publicitaires s’inquiètent des conséquences de la suppression de la publicité sur le groupe public sur l’équilibre général de ce marché.

L’annonce faite par Nicolas Sarkozy, faute de préparation et de concertation en amont, laisse beaucoup de questions en suspens. S’il est utile de lancer une grande réflexion sur le financement de l’audiovisuel public, on ne peut improviser ainsi une réforme aussi importante pour l’avenir de notre service public de l’audiovisuel.

Lire mon intervention sur le financement de l’audiovisuel public lors du budget médias pour 2008

Partager CE CONTENU

Partager sur facebook
Partager sur google
Partager sur twitter
Partager sur linkedin
Partager sur pinterest
Partager sur print
Partager sur email