Le 6 mars 2019, le ministre de l’économie et des finances Bruno LE MAIRE a présenté son projet de loi relatif à la taxation des grandes entreprises du numérique. Si pour Catherine MORIN-DESAILLY, présidente de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication du Sénat, ce texte de loi présente une avancée et constitue une étape dans la nécessaire régulation de l’Internet face aux géants du numérique qui menacent de plus en plus notre souveraineté, il reste très en deçà de l’ambition qu’il conviendrait d’avoir pour réformer en profondeur l’écosystème numérique.
Pour Catherine MORIN-DESAILLY, qui depuis 2013 alerte sur la nécessité de taxer les entreprises du numérique, il est vrai que l’on peut se questionner sur la pertinence d’une taxation nationale sur une problématique qui devrait relever de l’Union européenne. Mais, dit-elle « Je comprends que face à l’immobilisme de la Commission européenne, la France veuille impulser une dynamique et envoyer un message fort à destination des GAFAM. A cet égard, je salue l’initiative du ministre ».
« Je déplore qu’alors que toujours plus d’éléments sont portés à notre connaissance sur les pratiques illégales des plateformes dans le traitement des données des particuliers et des entreprises, sur les manœuvres d’intimidation et de chantage, nous ayons toujours dans notre pays une forme de complaisance naïve et nous nous contentions de mesurettes, comptant sur une autorégulation des plateformes ».
La sénatrice de la Seine-Maritime observe que nos voisins, allemands comme britanniques, ont la volonté de s’attaquer plus sérieusement à ces questions. « Il ne suffit pas de dire que l’on interdit la publication des propos haineux sur Internet, il faut proposer des mesures structurelles communes exigeant que soit rouverte la directive e-commercepour que soit enfin établi un régime de responsabilisation des plateformes. »
Auteure de plusieurs propositions de résolution européenne, Catherine MORIN-DESAILLY plaide de longue date pour que soient revues par ailleurs des règles de concurrence absurdes qui affaiblissent l’ensemble de nos entreprises européennes et empêchent l’émergence et l’ancrage d’un écosystème fort en Europe. « Aujourd’hui, commentateurs et citoyens, à la faveur des scandales révélés, commencent à réaliser que les GAFAM ont abusé fiscalement, se jouent de nos données, exercent un lobbying intense auprès des institutions et des gouvernements et ont volontairement cherché à affaiblir le RGPD. Pour autant, je regrette toujours l’absence de vision ambitieuse, coordonnée et stratégique de notre gouvernement. »
Les défis juridiques, économiques et culturels à relever sont immenses et commencent par une montée en compétence numérique de tous les citoyens à commencer par ceux qui nous gouvernent. Si la France veut adopter une position de leader en matière de stratégie numérique, elle doit mobiliser l’ensemble des instruments de l’Etat, tant industriels que juridiques et diplomatiques au profit d’une politique des technologies.