Mission enseignement scolaire pour 2009

MD Sénat © JPS - 046

Monsieur le ministre, les crédits de la mission « Enseignement scolaire » pour 2009 traduisent les priorités du Gouvernement dans le secteur de l’éducation. Ils s’inscrivent dans un contexte de réforme particulièrement marqué, qui répond aux deux priorités que vous vous êtes fixées : l’amélioration des résultats de notre système éducatif et la mise en place de dispositifs nouveaux pour les élèves afin de combattre et de réduire l’échec scolaire, qui reste l’une des faiblesses de notre école. C’est bien de manière structurelle qu’il faut s’atteler à cette tâche.

La stabilité budgétaire de cette mission, qui demeure le premier budget de l’État, avec près de 60 milliards d’euros, est à noter dans un contexte particulièrement difficile de nécessaire maîtrise des comptes publics. Elle traduit l’importance que notre pays accorde à l’école, et ces dépenses doivent être considérées comme un investissement pour l’avenir.

Cet effort financier permet en outre – c’est un point que je tiens à souligner – de préserver la qualité du taux d’encadrement et de présence des enseignants dans les classes compte tenu de la baisse des effectifs scolaires. Ce qu’on appelle le « face à face » pédagogique progressera même dans l’enseignement primaire grâce à l’ouverture de 500 classes supplémentaires.

Sur cette question particulièrement sensible de la baisse des effectifs enseignants, on ne saurait appliquer dans le système éducatif une logique purement comptable, au moment où l’on fait de la lutte contre l’échec scolaire la priorité. À cet égard, si nous approuvons les objectifs que vous fixez à la politique éducative – généralisation de l’accompagnement éducatif et du soutien personnalisé, poursuite des efforts engagés en vue de la scolarisation des enfants handicapés, et dieu sait s’il y a à faire dans ce domaine ! – et les moyens qui leur sont alloués, nous souhaitons néanmoins évoquer le sort des RASED.

En effet, je m’interroge sur la réforme prévue dans ce budget de la sédentarisation de 3 000 postes affectés aux RASED. Il a beaucoup été question de ce sujet ces dernières semaines ; plusieurs intervenants l’ont évoqué à la tribune ce matin.

La décision d’affecter 3 000 enseignants des réseaux d’aide et de soutien aux élèves en difficulté dans des écoles sur les 11 000 postes existants suscite des inquiétudes légitimes de la part des sénateurs de mon groupe. Chacun d’entre nous s’est tellement investi localement qu’il a été directement et à juste titre interpellé. La crainte est qu’« un affaiblissement de ces équipes constituerait un grave préjudice pour les élèves en grande difficulté », comme l’ont dit les inspecteurs de l’éducation nationale.

Comme cela a déjà été rappelé, les RASED ont pour mission de fournir des aides spécialisées à des élèves en difficulté dans les classes ordinaires des écoles primaires, à la demande des enseignants de ces classes, dans ces classes ou hors de ces classes.

J’ai bien entendu les arguments que vous avez avancés en commission, monsieur le ministre : les nouveaux dispositifs de soutien scolaire mis en place à l’école primaire, l’inadaptation de l’action des RASED ou le recentrage de leur action sur les écoles en zone difficile, ce qui peut d’ailleurs être justifié. Pour autant, les inquiétudes demeurent, notamment en ce qui concerne les élèves des autres écoles. En effet, aucun bilan de leur action n’a été effectué avant de prendre cette décision.

Les enseignants spécialisés des RASED, de par leurs compétences et leurs formations, ont de vraies dispositions dans le repérage et le traitement des difficultés scolaires. Celles-ci ne sont pas uniquement concentrées sur certaines écoles, elles peuvent aussi, et c’est souvent le cas, être liées à des difficultés psychologiques ou sociales.

Il me semble donc que les missions qu’ils remplissent, centrées sur des enfants aux difficultés scolaires beaucoup plus profondes que de simples difficultés d’apprentissage, sont utiles et ne peuvent être traitées par des enseignants sans formation spécifique.

S’il m’a semblé utile de rappeler les priorités du Gouvernement en matière scolaire, c’est parce que le nombre de réformes annoncées ou mises en œuvre en 2008 est élevé. Ce rythme peut parfois donner le tournis, notamment aux enseignants et aux parents, qui ont du mal à s’y retrouver.

On ne saurait trop insister sur la nécessaire concertation. Il faut faire œuvre de pédagogie afin que les réformes soient comprises et acceptées par les personnels enseignants, les parents ou les élus qui sont mis à contribution dans leur mise en œuvre. Je reviendrai tout à l’heure sur ce point pour ce qui concerne les élus locaux.

Ainsi, la réforme des lycées nous semble aller dans le bon sens, notamment en ce qui concerne les rythmes scolaires et le recentrage des enseignements sur les connaissances fondamentales. Mais j’appelle votre attention, monsieur le ministre, sur l’inquiétude des enseignants et des parents au sujet des modalités pratiques de mise en œuvre, dès la prochaine rentrée scolaire, de l’organisation de la seconde en semestres et en modules, telle que vous nous l’avez d’ailleurs présentée en commission.

Parmi les actions prioritaires du Gouvernement, je souhaite maintenant m’arrêter un instant sur les mesures de revalorisation du métier d’enseignant, dont on voit la traduction dans ce projet de budget.

Nous savons tous en effet que les débuts de carrière de nos jeunes enseignants sont difficiles. C’est pourquoi la création d’une prime d’entrée dans les métiers de l’enseignement, de l’éducation et de l’orientation d’un montant de 1 500 euros est particulièrement bienvenue.

Dans la même logique, l’annonce récente par le ministre d’un prêt immobilier à taux zéro dont bénéficieraient les professeurs qui obtiennent une mutation me semble une excellente mesure.

C’est également dans cette logique qu’a été créée une prime spéciale de 500 euros liée aux heures supplémentaires pour les enseignants qui assurent au moins trois heures supplémentaires hebdomadaires dans l’enseignement secondaire. En complément de mesures renforçant l’attractivité des heures supplémentaires, cette prime vient valoriser les enseignants qui s’investissent particulièrement dans leur métier.

Ces différentes mesures permettent d’augmenter substantiellement le pouvoir d’achat des enseignants, notamment de ceux qui sont en début de carrière. Elles participent à l’amélioration de leur situation matérielle et morale et contribuent à une meilleure reconnaissance de leur métier. Nous ne pouvons donc qu’y être favorables.

Ces mesures ont pour corollaire la question de la formation initiale et continue des enseignants, qui est l’une des questions les plus importantes pour l’avenir du métier.

Lors de l’examen du projet de loi sur l’école, j’avais insisté sur la nécessité de profiter du renouvellement sans précédent des personnels enseignants pour traiter la question de leur formation. La commission présidée par Marcel Pochard sur la redéfinition du métier d’enseignant a engagé ce chantier.

Une première étape a été enclenchée avec la réforme du recrutement et de la formation des futurs enseignants, qui entrera en vigueur en 2010.

L’intégration des IUFM aux universités, prévue par la loi sur l’école de 2005, doit permettre de mieux recruter et de mieux préparer les futurs enseignants. Il faut en effet favoriser le plus en amont possible la présence des futurs enseignants dans les classes et les établissements pour les préparer au mieux aux réalités du terrain.

Tel est, si j’ai bien compris, l’objectif de cette réforme. Il est en effet important que, dès leur première année d’exercice, les lauréats des nouveaux concours soient mis en situation d’enseignement à temps plein avec l’aide et le soutien des professeurs expérimentés, comme vous l’avez évoqué, monsieur le ministre.

Il ne faut pas non plus oublier de repenser la formation continue, élément indispensable pour s’adapter à un monde qui bouge. Les enseignants doivent pouvoir enrichir constamment leur pratique pédagogique.

Il faut enfin réfléchir aux possibilités d’évolution ou de reconversion pour les enseignants « usés » par des années d’enseignement. Il faut leur permettre de s’ouvrir à de nouvelles perspectives en offrant à ceux qui le souhaitent de nouvelles missions et en jetant des passerelles vers d’autres métiers.

Je veux terminer mon propos sur les difficultés qu’éprouvent les collectivités locales à mettre en œuvre les décisions prises par le ministère. Je pense à la suppression de l’école le samedi matin et au service minimum d’accueil en cas de grève.

Lors de l’examen de ce projet de loi instituant un droit d’accueil pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires pendant le temps scolaire, les sénateurs, en prise direct avec les élus locaux et les réalités du terrain, ont insisté sur les difficultés juridiques et pratiques que poserait ce texte, notamment en milieu rural.

Les maires revendiquaient et revendiquent toujours plus de souplesse et de garanties dans la mise en place de ce dispositif, certes attendu par les familles, mais particulièrement difficile à mettre en œuvre, notamment pour l’organisation de l’accueil des élèves dans leurs communes. Ils ont du mal à accepter ce dégagement de la responsabilité de l’État sur leurs communes alors qu’ils estiment déjà assumer leurs responsabilités. Aussi, nous vous demandons de prendre en compte la réalité des petites communes qui n’auraient pas le personnel nécessaire et qualifié pour assurer ce service. C’est d’ailleurs ce qui s’est produit lors de la dernière grève.

Chacun aura entendu le Président de la République dans son discours de clôture du congrès des maires annonçant des assouplissements possibles de la loi instaurant ce service minimum, notamment pour les petites communes. Le Président de la République a ainsi tenu compte des difficultés rencontrées par les communes et fait un pas en direction des maires.

En expliquant que l’on « ne peut pas demander la même obligation au maire d’un secteur rural » qu’aux maires des grandes villes, il a répondu aux interrogations des maires, choqués de voir leurs collègues traînés devant les tribunaux par les préfets, non parce qu’ils ne veulent pas appliquer la loi, mais parce qu’ils ne le peuvent pas faute de moyens humains mobilisables.

Le groupe centriste attend donc avec impatience des aménagements à cette loi pour les communes rurales et sera attentif, comme il l’a été lors de l’examen du projet de loi, à celles que vous proposerez, monsieur le ministre. M. Yves Détraigne interviendra d’ailleurs à ce sujet tout à l’heure. En attendant, peut-être pouvez-vous nous indiquer les pistes sur lesquelles vous travaillez. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP.)

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