Projet de loi Santé : de la nécessité de libérer du temps médical

Chère collègue, cher collègue,

Le Sénat a adopté, le 11 juin 2019, le projet de loi relatif à l’organisation et à la transformation du système de santé .

Aujourd’hui, 6 millions de Français résident dans un désert médical et sont ainsi victimes de l’inégalité d’accès aux soins. Une récente étude du journal Le Monde a montré que les délais d’attente en Normandie pour l’essentiel des spécialités étaient largement supérieurs à la moyenne nationale. 

D’un autre côté, seuls 3% des futurs médecins souhaitent un exercice libéral isolé, 45% d’entre eux veulent un exercice regroupé et seulement 27% se dirigent vers un exercice mixte. Dans le même temps, les conditions d’exercice des professionnels de santé se cessent de se dégrader. 

Face à cet état d’urgence sanitaire et social, le Sénat a souhaité amender le projet de loi de réforme du système de santé dans le sens d’une plus grande équité territoriale. La commission des affaires sociales du Sénat a regretté que ce projet de loi s’apparente  davantage un cadre général d’orientations qu’à une réforme structurante. En effet, notre Haute Assemblée attendait de véritables propositions sur la gouvernance du système de santé et son financement, seules réponses valables à la crise d’un modèle de santé à bout de souffle. 

Le Sénat n’a pas manqué de dénoncer les trop nombreuses habilitations à légiférer par ordonnances – qui sont autant de chèques en blanc donnés au Gouvernement – sur des sujets majeurs : hôpitaux de proximité, développement de la prescription électronique, missions des agences régionales de santé, etc.

En l’état, cette réforme de notre système de santé doit principalement répondre aux enjeux de notre temps que sont le vieillissement de la population, la prévalence des pathologies chroniques et la lutte contre les déserts médicaux. Le projet de loi a par ailleurs pour ambition de décloisonner et renforcer la coopération entre professionnels de santé en s’appuyant sur les initiatives locales et en promouvant le recours au numérique. A cet égard, les dispositions du texte prévoient le soutien à l’innovation en matière d’utilisation des données de santé, la création d’un espace numérique de santé ou encore le déploiement de la télésanté.

Le projet de loi ambitionne de créer un collectif de soins au service des patients et de mieux structurer l’offre de soins dans les territoires. Les sénateurs ont voté l’exonération de cotisations sociales pour les jeunes médecins s’installant en zones intermédiaires et les zones sous-denses. En outre, le critère des besoins en santé des territoires primera sur celui de la capacité d’accueil des universités dans la détermination du nombre d’étudiants reçus en 2e et 3e années de premier cycle. Dans le cadre de la convention nationale entre les médecins et l’assurance-maladie, les sénateurs ont instauré une obligation de négocier la contribution des médecins à la réduction des inégalités d’accès aux soins. 

Afin de décloisonner les parcours de formation et les carrières des professionnels de santé, le texte comprend trois séries de mesures relatives aux études et au développement des compétences des médecins, à leur début de carrière et aux statuts et conditions de recrutement des professionnels de santé à l’hôpital. 

La commission de la culture, de l’éducation et de la communication du Sénat que j’ai l’honneur de présider a été saisie des dispositions réformant les études de santé. Elle ainsi adopté des amendements visant à :

-donner aux formations de santé un objectif de répartition équilibrée des futurs professionnels sur le territoire ;
– donner la possibilité aux étudiants de changer d’université entre leur premier et leur deuxième cycle d’études de santé ;
– repousser l’entrée en vigueur de la réforme à la rentrée universitaire 2021 ;
-faire que les 2e 3e cycles proposent aux étudiants de médecine des stages dans les zones sous-denses ainsi que la participation à des échanges internationaux.

Notre commission s’est positionnée en faveur de la suppression du numerus clausus même si, en réalité, le contingentement des places sera toujours appliqué. Elle recommande que cette réforme s’accompagne de plusieurs volets afin de repenser les études de médecine dans le respect de l’équilibre entre territoires. Elle a ainsi souhaité intégrer, dans les objectifs généraux des formations de santé, l’objectif de répartition équilibrée des futurs professionnels de santé sur le territoire. 

En sa qualité de représentant des collectivités territoriales, le Sénat a formulé des inquiétudes quant risque de déclassement de certains hôpitaux, aggravant le sentiment de désert médical. Les sénateurs ont toutefois salué un début de renforcement de la démocratie locale. Celui-ci pourrait aller plus loin en donnant une plus grande place aux élus, professionnels de santé et associations de patients afin de contrebalancer les pouvoirs des agences régionales de santé dont le ressort territorial semble les déconnecter des besoins des territoires. 

En séance publique, le groupe Union Centriste auquel j’appartiens a fait adopter des amendements visant à :

– concerter les élus au niveau du département sur l’organisation territoriale des soins ;
– autoriser les intercommunalités à participer à l’élaboration et à la mise en œuvre du projet territorial de santé ; 
– faciliter l’agrément des praticiens maîtres de stage des universités pour les étudiants de 2e et 3e cycles ;
– sécuriser les flux d’accès en 2e cycle des formations de médecine, pharmacie, odontologie, maïeutique pour les étudiants ayant validé leur 1er cycle de formation ;
– coordonner la durée des contrats territoriaux de santé, des contrats territoriaux de santé mentale et des contrats locaux de santé avec celle du schéma régional de santé ;
– sécuriser, pour les étudiants en médecine et en odontologie, le contrat d’engagement de service public en alignant la durée du bénéfice du zonage des zones sous-denses sur celle de l’internat de médecine générale.

Notre groupe Union Centriste a salué un projet de loi indispensable en ce qu’il vise à libérer du temps médical, à casser les démarches en silo et à structurer les territoires pour répondre aux défis de notre temps.

Si notre groupe souscrit à cette ambition de réorganisation de notre système de santé, ce chantier devra passer davantage par une démarche de terrain que par la loi. 

Le projet de loi relatif à l’organisation et à la transformation du système de santé devra encore faire l’objet d’un consensus entre députés et sénateurs réunis en commission mixte paritaire. 

Bien à vous,
Catherine MORIN-DESAILLY

Vous pouvez me contacter pour toute information complémentaire ou consulter le site www.seinemaritimeterritoires.fr pour retrouver l’ensemble des Devous@moi

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