Tests ADN : explication de vote

Hier soir, je suis intervenue sur l’article 5 bis du projet de loi relatif à la maîtrise de l’immigration, à l’intégration et à l’asile qui autorise le recours à des tests ADN pour les candidats au regroupement familial. Vous trouverez ci-dessous le texte de mon intervention rappelant mon opposition à cette disposition.

L’amendement introduit par Thierry Mariani fait, à juste titre, polémique depuis une dizaine de jours. Même assortie de quelques conditions posées par le Gouvernement et de sous amendements, cette mesure est inacceptable. Les défenseurs de l’amendement présentent ce recours au test ADN comme une liberté offerte aux étrangers voulant aller plus vite, comme un outil supplémentaire, facile et moderne, et utilisé par nombre de nos voisins européens.

Ce n’est parce que certains pays la pratiqueraient que nous devons faire de même.
Ce n’est pas parce que c’est simple et moderne et qu’ils ne seraient plus réalisés que sur la mère afin d’éviter les découvertes tragiques dont nous avons parlé, que nous devons adopter cette mesure. 
Ce n’est pas parce que c’est une faculté qui sera expérimentée pendant deux ans que nous devons nous abstenir d’en examiner maintenant les incidences.

On ne sait d’ailleurs plus très bien si le dispositif proposé ainsi amendé parce qu’il complexifie la procédure et la rend inapplicable, répond encore à l’objectif initial. Je pense surtout qu’il faut revenir à l’essentiel, c’est-à-dire les principes. Ces amendements ne changent rien au fond de l’affaire. Les tests ADN sont maintenus et leur existence même modifie profondément la conception que nous nous faisons de la famille et qui est celle du droit français.

J’ai entendu sur l’ensemble de ces bancs, au-delà des clivages partisans habituels, Hugues Portelli (UMP), Michel Mercier (UDF) et Robert Badinter (PS), tous éminents juristes, réaffirmer que nous avons en France une vision plus large, plus humaine et plus respectueuse des liens affectifs qui se tissent entre les êtres, puisqu’en droit français la filiation n’est pas biologique mais fondée sur la reconnaissance. Cette mesure même encadrée juridiquement remet donc en cause notre conception de la famille et crée une discrimination entre les familles françaises et les familles étrangères. Pourquoi exiger des familles étrangères des preuves qu’on ne demanderait pas aux familles françaises ?

La brèche ainsi ouverte par voie d’amendement dans un projet de loi sur l’immigration sans consultation aucune notamment du comité national d’éthique, est contraire à la lettre et à l’esprit de notre droit.

Au nom d’une certaine idée que j’ai de la République mais aussi de l’enfant, qui ne saurait se résumer à un génome, je suis, comme beaucoup de mes collègues, totalement hostile à cette mesure dans son principe même. Aussi avec plusieurs de mes collègues nous voterons contre ou nous abstiendrons sur cet article. En ce qui me concerne je me prononcerai contre cette mesure.

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